Francine Joyce
Nutrition

Alimentation des tout-petits

Diversification alimentaire : quand le lait ne suffit plus

Alimentation des tout-petits
Photo by hui sang / diversification alimentaire

Période souvent très attendue des parents, la diversification alimentaire du bébé est souvent source d’interrogations multiples. Faut-il intégrer de nouveaux aliments tard pour préserver des allergies ? ou tôt pour favoriser la tolérance alimentaire ? Dans quel ordre faut-il les introduire ? Faut-il ajouter systématiquement des minéraux, des vitamines et des oligo-éléments dans les préparations pour bébé ?

Aujourd’hui, la mise en place de la diversification a perdu son aspect naturel au profit d’approches de plus en plus scientifiques.   

Lorsque le lait ne suffit plus à couvrir les besoins du nourrisson, le passage à une alimentation plus variée s’impose graduellement. C’est une étape d’adaptation physiologique, sensorielle et psychoaffective qui va conduire l’enfant à une alimentation autonome et omnivore. L’âge idéal de la débuter ainsi que les modalités de sa mise en place ont singulièrement évolué au fil du temps -influencés par le contexte socioculturel, économique, les habitudes familiales, les modes … Autrefois, on attendait souvent la première dent pour proposer bouillies à base d’eau, pain, sel, beurre et jaune d’œuf. Et puis les bénéfices d’une diversification précoce (meilleure croissance et meilleure résistance aux infections) a conduit les instances médicales à préconiser la diversification vers l’âge de 6 mois.

Aujourd’hui, il est recommandé de la débuter après 4 mois révolus (17 semaines) et au plus tard à 6 mois révolus (26 semaines) pour TOUS les groupes d’aliments, notamment ceux riches en fer (œufs, viande) et en acides gras polyinsaturés à longue chaîne (œufs, poissons gras).

L’introduction du gluten doit être progressive -entre 4 et 7 mois. Depuis les années 70 les recherches sur la prévalence des pathologies allergiques ont démontré que les risques d’eczéma et d’allergies augmentent quand la diversification est engagée avant 4 mois. Aucune étude n’a démontré le bénéfice d’une introduction retardée après 6 mois sur l’apparition de réactions allergiques. Rien ne justifie donc de retarder voire d’exclure au-delà de 6 mois des aliments utiles sur le plan nutritionnel comme les laitages, les œufs ou le poisson, même chez les enfants à risque (ayant au moins un parent allergique). Au contraire, l’exposition digestive à cet âge pourrait en améliorer la tolérance.

En pratique :

Tant que le système digestif de l’enfant n’est pas complètement mature il faut lui laisser le temps de s’habituer à différents aliments en les introduisant un par un pour qu’il se familiarise et mette en mémoire des textures variées et tout un catalogue de goûts nouveaux.

Au cours de cette phase le lait doit rester l’aliment de base. L’enfant doit continuer à boire au moins 500 mL de lait par jour jusqu’à ses 3 ans.

A partir de 6 mois l’un des biberons peut être remplacé par un yaourt ou du fromage blanc nature ; Fromage (râpé et pasteurisé) à partir de 7 mois.

Il ne faut pas négliger l’hydratation du bébé à ce stade car les nouveaux aliments contiennent moins d’eau que le lait. Donnez de l’eau en cas de forte chaleur ; il est préférable d’éviter les jus de fruits à ce stade.

Les légumes peuvent être introduits dès le 5ème mois dans le biberon ou à part. Commencez par les légumes oranges (carottes, potiron, courge …) puis verts ( haricots verts, épinards, courgettes sans pépins ni peau ). Evitez les plus riches en fibres au départ : artichauts, salsifis, vert de poireaux, petits pois. Attendre 8 mois pour les choux, chou-fleur, brocoli, artichauts ;  12 mois pour la tomate, le céleri, l’aubergine, les champignons, le concombre

Les légumes doivent être cuits (à l’eau, à la vapeur ou au micro-ondes sans ajout de sel, éventuellement avec des herbes) ; l’eau du biberon peut être remplacée par l’eau de cuisson des légumes. Petit à petit, vous pouvez ajouter des légumes mixés ou de la pomme de terre pour obtenir une soupe épaisse. Les légumes du jardin peuvent être utilisés si on a pas abusé d’engrais ou de pesticides, tout comme les surgelés.

3 à 6 cuillères à café par jour suffisent pour débuter  (90g/j maximum) ; à 10 mois les portions peuvent atteindre 120g.

Les fruits peuvent être introduits 15 jours après les légumes. Ils peuvent être donnés écrasés, crus bien murs, épluchés, épépinés ou être cuits en compote sans sucre ajouté. Commencez par : pommes, poires et banane puis pêche, prune, abricots. Attendre un an pour les fruits rouges (fraises, framboises) et les fruits acides (ananas).  Eviter les fruits exotiques (kiwi, papaye…) jusqu’à 12 mois ; les noix, amandes, noisettes même écrasées, pas avant 3 ans.

La viande et le poisson peuvent être proposés dès 5 mois hachés ou mixés finement avec les légumes. Ne pas dépasser 1 cuillère à café par jour. A 7 mois on peut introduire le blanc de poulet ou de dinde et le jambon. On peut également donner ½ jaune d’œuf bien cuit 2 fois par semaine. A partir de 8 mois on peut introduire le bœuf, le porc, l’agneau et le poisson blanc non pané. Pour débuter, choisir des poissons blancs au goût peu prononcé (sole, colin, cabillaud) puis le saumon. Eviter ceux qui ont beaucoup d’arrêtes (dorade, truite). Pas de crustacés avant 3 ans.  A 7 mois, on peut donner 10g/jour (2 cuillères à café) ; à 9 mois : 15g (soit 3 cuillères à café)            

A partir de 5 mois, les farines infantiles sont une bonne solution pour les « petits appétits » car elles apportent de l’énergie sans augmenter le volume du lait. Elles épaississent progressivement la consistance et permettent d’espacer les repas - on peut ajouter 1 à 2 cuillères à café de farine 1er âge sans gluten au biberon ou les utiliser dans une soupe de légumes.

Pain et produits céréaliers (pâtes, semoule, riz) à partir de 7 mois. Les biscuits qui s’écrasent en fondant dans la bouche peuvent être proposés de temps en temps au goûter mais pas entre les repas au risque d’habituer l’enfant au grignotage

Ne pas introduire les matières grasses avant 6 mois et en petites quantité ; surtout éviter les fritures. Arachide pas avant 3 ans.

Cet élargissement de la palette des goûts et des textures doit avant tout être source de plaisir pour l’enfant et pour ses parents.

Dr Danièle M’Baye – Pédiatre ; Francine Joyce – Diététicienne

Share this article

Read next